De la marine à voile à la marine moderne : Stanislas Charles Henri Dupuy de Lôme. Un ingénieur de génie en pleine ère Steam Punk
Né en 1816, après l’ère Napoléonienne, Stanislas Charles Henri Dupuy de Lôme est un homme très peu connu en France. Et pourtant, c’est l’homme qui va faire trembler l’Empire britannique en remettant en question la supériorité militaire et technique de la Royal Navy.
Alors qu’il étudie avec succès à Polytechnique, les marines n’ont pas changé depuis des siècles. Les navires sont des vaisseaux en bois dont les flancs sont hérissés de canons… Toutefois, cela n’est qu’apparence. Les boulets explosifs (créé en France) rendent particulièrement vulnérables les navires en bois. Ensuite, la stucture interne des navires n’est plus en bois, mais en métal. C’est d’ailleurs pour étudier les techniques anglaises que le jeune polytechnicien Dupuy de Lôme part en Angleterre. Il publie en 1844 ; « Mémoire sur la construction des bâtiments en fer ».
La technologie du fer est une révolution à l’époque. Mais sur ses plans sont construits deux navires ; le Caton et l’Ariel. Mais c’est le navire à propulsion à vapeur « Napoléon » qui va le rendre célèbre. Seul navire à propulsion à vapeur grâce à une hélice. Il peut combattre comme les autres navires… mais ne dépend plus ni du vent ni de la marée. Mieux, c’est lui qui va remorquer les flottes anglaises et françaises lors de la guerre de Crimée.
A partir de cet épisode, la marine nationale n’utilisera plus de voiliers purs comme navire de combat. Les voiliers sont transformés avec l’ajout d’une propulsion à vapeur. Mission qu’assume Dupuy de Lôme. L’Angleterre hésite. Elle à la flotte la plus importante. Le coût de la transformation serait pharaonique. Mais elle n’aura guère le choix…
A cette époque, Dupuy de Lôme est déjà une « star ». En 1855, on lui remet la médaille d’honneur lors de l’exposition universelle de Paris. Mais Dupuy de Lôme travaille déjà sur un autre projet. En 1859, la « Gloire » est lancée. C’est une frégate cuirassée. Si elle des flancs en bois, recouverts de blindage, c’est seulement parce que l’industrie française est incapable de produire suffisamment de blindage. La Couronne qui suivra aura une coque en métal avec blindage intégré. Les cuirassés modernes sont nés.
Encore une fois, la supériorité de la Royal Navy est remise en cause. Les Anglais sont consternés et furieux.
Ce qui se paiera lors de la guerre de 1870-1871… les anglais ne sont « Fair play » que lorsqu’ils gagnent !
C’est pour produire des blindages en quantité suffisante, que l’industrie métallurgique lourde est créée en France. Et ce blindage inspire Dupuy de Lôme. Il va participer à la mise au point des premiers trains blindés et armés en France. Trains qui ne seront pas prêts à temps pour contrer les prussiens. Malheureusement, ils seront utilisés lors des tristes événements de la commune de Paris.
Toutefois en 1870, lors du siège de Paris, Dupuy de Lôme assure la construction des ballons qui permettent à Paris de communiquer avec le reste de la France. Gambetta pourra rallier le gouvernement de province grâce à l’un d’eux. Mais ces ballons ne sont pas dirigeables. Dupuy de Lôme se met à étudier un dirigeable (propulsé par 8 marins actionnant une hélice). Le vol est un succès… surtout au vu du matériel disponible ! Dupuy de Lôme définit également les infrastructures nécessaires pour la production et l’entretien de ces engins. Mais la même année, Giffard utilise un dirigeable avec un moteur. Cet engin est bien plus performant. Et malgré la parution de ses données techniques (qui vont servir à bien des concepteurs ensuite), le travail de Dupuy de Lôme dans ce domaine est oublié.
Mais Dupuy de Lôme est déjà en train de travailler sur un autre domaine : les sous-marins. Avec Gustave Zédée, il travaille sur le premier sous-marin réellement opérationnel : le « Gymnote ». Il va inspirer un certain Jules Verne… La légende veut que c’est Dupuy de Lôme et Zédée qui ont fourni la description du Nautilus.
A cette époque, il prend une retraite bien méritée… et se fait élire à l’académie des sciences. Puis comme député du Morbihan et finit comme sénateur.
Toutefois, la retraite active d’un politicien n’est pas fait pour un homme comme lui. Il assure avec succès durant 16 ans la direction des chantiers navals de la Ciotat et de la Seyne sur mer (FCM) et de la compagnie de transport les messageries maritimes ».
Admiré de son vivant, il recevra de nombreuses décorations de pays étrangers comme de l’Autriche Hongrie, de l’Empire Ottoman et de la maison de Savoie. Ce qui est d’autant plus admirable, qu’à l’époque ces pays sont dans le camp de l’Empire du Kaiser. Par contre, alors qu’elle est notre alliée, jamais l’Angleterre ne pardonnera à l’homme qui a remis en question tant de fois sa supériorité.
Stanislas Charles Henri Dupuy de Lôme est sans contestation possible un des plus grands ingénieurs du XIXe siècle. Ingénieur de génie, sa vie pourrait faire l’objet de bien des romans.
Pourtant, alors que notre pays lui doit tant, il est oublié et seuls deux statues rappellent son œuvre.