Le Bossu - chapitre 4
Chap 4 - Bloqués
Hagork est toujours en train de frapper et d’insulter la porte blindée qui le bloque. Il ne peut aller vers la passerelle. Soudain, son vaisseau se met à vibrer fortement. Le métal crie comme s’il se déchirait. Hagork recule. Que se passe t’il ? Si cette foutue porte ne l’avait pas bloquée, il aurait été sur la passerelle, en train de diriger l’attaque. Ce système de porte est bien une idée de zoms. En y réfléchissant, Hagork se dit que ce n’est pas la seule idée étrange que les zoms ont eu lorsqu’ils ont construit cet engin. Ils ont fait une deuxième passerelle. Une passerelle plus petite, mais avec tout ce qu’il fallait. Une idée idiote. Il n’y a qu’un seul big boss à bord de ce vaisseau. Il ne peut pas être à deux passerelles en même temps. Mais, cette disposition idiote va lui être particulièrement utile. Il y avait surtout une liaison directe avec la vraie passerelle. Il a besoin d’insulter les incapables qui sont aux commandes de son vaisseau. Tout en se dirigeant vers la passerelle de secours, Hagork se met à réfléchir aux insultes qu’il va pouvoir déverser sur ses boyz. Sans trop savoir pourquoi, il se sent d’inspiration lyrique en ce moment.
« Pacha ? T’est mort ?... » Demande Le Tellier.
« Non, je ne suis pas ton officier. Et non, je ne suis pas mort ! Ceci dit, j’ai l’impression d’être qu’un groupe de boxeurs s’est servi de moi comme sparing partner pendant des jours... » Répond Lagardère à son ami. Le cockpit de la navette ressemble à un tas de ferraille. Il n’y a plus de lumière. Les consoles et les moniteurs sont soit hors fonction, soit détruits. Certains émettent même une légère fumée. Mais, l’engin semble rester étanche.
« Je me demande où on est ? » Reprend Lagardère.
« On est vivant et on est dans la navette !!! Mais c’est vrai que tu réfléchi comme un officier !!! » Répond en se marrant l’artilleur. Il reprend devant l’air interloqué de Lagardère.
« On ferait bien de mettre les combinaisons étanches qui sont dans les réserves de la navette. On a percuté la canonnière ork dans la passerelle. On subit encore une gravité et on ne sent pas de vibrations du au fonctionnement des propulseurs de la navette. On est donc toujours coincé dans le vaisseau ork. Du moins, je l’espère !!! » Lagardère considère le matériel détruit.
« On ne risque pas de prendre contact avec l’Aurore. Tu as raison. On a intérêt à mettre ces combinaisons et à sortir d’ici. L’atmosphère va rapidement être viciée et on à même intérêt à vite sortir avant que la navette explose » Le Tellier se fige alors.
« Comment cela, qu’elle explose ? Et pourquoi exploserait elle d’abord ? »
« On a poussé les propulseurs à fond pour aborder la canonnière ork. Les générateurs devaient être à fond. Le choc à du maintenir l’ordre de génération d’énergie, mais comme la navette est bloquée et que les propulseurs sont détruits l’accumulation d’énergie va finir par dépasser un seuil critique et... »
« Boum !!! Jolie histoire, mais tu l’invente à partir de quelle idée saugrenue ? » Demande l’artilleur visiblement septique.
« C’est affiché sur les indicateurs de secours des générateurs derrière toi. » Réponds calmement Lagardère.
« Tu ne pouvais pas le dire avant !!! Où sont les tenues et l’équipement dans cette satanée navette ? » Demande un Le Tellier particulièrement énervé.
« Suis-moi. Tout est stocké dans les compartiments près du sas arrière. Comme celui ci est en retrait, il n’a pas du subir trop d’efforts et doit fonctionner encore. On va pouvoir sortir tranquillement... »
« Tu sais ou tu espère ? » Demande Le Tellier. Lagardère soupire. Il est épuisé. Admiratif, il se demande comment son ami fait pour avoir autant d’énergie. Le Tellier est tout aussi admiratif, son ami reste calme et continue de s’adapter malgré les coups durs. Sans en prendre conscience, ils forgent entre eux un lien qui va les lier pour le reste de leur vie. Lagardère reprend le premier.
« J’espère... J’espère aussi que l’on a réussi. Que l’Aurore a put s’échapper... » Une pluie d’étincelles interrompt les deux hommes. Après un moment de silence, ils foncent hors du cockpit. L’heure est à l’urgence et non aux considérations philosophiques.
Après avoir quitté le cockpit, les deux officiers mariniers mettent leur tenue étanche et prennent les paquetages d’urgence. Une dernière inspection de leur tenue et de ce qu’ils emportent et les deux hommes s’enferment à l’intérieur du sas. Les systèmes automatiques sont hors fonction. Ce qui n’est pas une surprise pour eux. Passant en mode manuel, ils cassent un boitier pour actionner l’évacuation manuelle de l’atmosphère du sas. Un petit conduit d’évacuation est dégagé par l’action d’une série de boulons explosifs. Le conduit à un diamètre tellement petit, que le retrait de l’atmosphère vers l’extérieur n’est pas explosif. L’évacuation atmosphérique du sas est une première information ; l’endroit où est bloqué la navette est soumis à la gravité, mais l’atmosphère n’est pas maintenue. Leur attaque semble être un succès. Une fois la densité atmosphérique du sas égale à celle à l’extérieure, c’est à dire nulle. Les deux hommes s’attachent à déverrouiller la porte extérieure. C’est un lourd panneau qui doit basculer vers l’intérieur. Si elle était déverrouillée par erreur. La pression intérieure maintiendrait le panneau contre la paroi en protégeant l’intégrité atmosphérique de la navette. Cette disposition particulière est par contre un handicap sérieux pour la manutention manuelle du panneau. Les deux hommes doivent faire attention à ne pas être coincé par celui contre une paroi du sas. Une opération d’autant plus difficile, qu’ils sont épuisés.
Au bout d’un quart d’heure, ils débouchent à l’extérieur de la navette... dans la passerelle du vaisseau ork !
« Superbe tir Pacha !!! Il faut avouer qu’avec un artilleur comme moi à la visée, c’est du tout cuit ! »
« Tu remarque que la pression atmosphérique n’est pas tout à fait nulle ? » Fait remarquer Lagardère.
« Bien sur ! Les orks maintiennent leur intégrité atmosphérique non par une coque comme nous, mais par un champ de force. L’atmosphère à dut se détendre pour occuper le volume délimité par le plus proche champ de force actif. C’est d’ailleurs étonnant. Un tel champ de force aurait du nous dévier, même légèrement. » Observe Le Tellier.
« Regarde l’équipement de la passerelle. C’est d’origine humaine. Il doit s’agir d’un vaisseau capturé. Les orks ont à peine eut le temps de le mettre à leur goût... Les cloisons étanches ont du se mettre en fonction automatiquement. On est isolé du reste du navire à l’abri des ork !!! »
« Erreur fatale bleu bite !!! » Lagardère regarde, surpris son ami. Malgré la tenue étanche, Le Tellier observe son ami et ne cache pas son amusement.
« Mais c’est que tu t’es habitué à ton rang d’officier... » Si Le Tellier pouvait observer directement, le visage de son ami, il verrait qu’il est rouge brique. Lagardère en a honte, mais son ami à raison.
« La navette va finir par nous sauter à la tronche ! Il faut que l’on trouve refuge à l’intérieur du vaisseau. On ne peut pas aller à l’extérieur, on risque d’être broyé par les champs électromagnétiques de protection s’il plonge dans le warp. Et je ne parle même pas des mutations... Et on ne peut pas aller à l’intérieur. Les portes blindées des cloisons étanches sont verrouillées. Et elles le resteront tant que la passerelle sera décompressée. Tu as une idée bleu bite ? » Reprend Le Tellier. Lagardère observe avec attention la passerelle. Puis il se dirige vers un endroit à peu près intact. Activant quelques consoles, il finit par s’installer devant la première qu’il réussit à mettre en marche. L’artilleur finit par s’impatienter.
« Qu’est ce que tu bricole ? Il faut que l’on trouve le moyen de se mettre à l’abris !!! Et vite !!! »
« Comme le vaisseau est d’origine humaine. Je suppose que les procédures sont comparables aux nôtres. Je réinitialise la console pour retomber sur la programmation de base et accéder au système. J’ai un peu de mal avec le langage impérial... mais... c’est fait !!! »
« C’est cool de savoir que les systèmes de calculs sont opérationnels et que les réseaux d’informations fonctionnent encore. Mais cela nous aide en quoi ? »
« Je vais introduire un mot de passe pour les maintenances techniques... C’est là... »
« Tu as l’intention de passer le balai dans les coursives ? » Le Tellier est un peu énervé. Il ne sait pas de combien de temps ils disposent encore. Et il voudrait bien savoir à quoi joue Lagardère.
« Le mot de passe va nous accorder le contrôle de tous les panneaux et toutes les portes. C’est une procédure qui est employée pour faciliter les maintenances techniques » explique Lagardère.
« La fermeture des portes du sas est une procédure d’urgence. Elle est annule les procédures de maintenance. On ne peut pas pénétrer à l’intérieur » conteste Le Tellier.
« C’est vrai si on passe par les portes de la passerelle. Mais nous, on va passer par les panneaux de la coque, par l’extérieur ! »
« Par l’extérieur ? »
« Par l’extérieur, on suit les dégâts provoqués par notre navette, on sort sur la coque et on cherche un panneau pour rentrer à bord. Là, on est sauvé et on improvise ! Et comme on est pas dans le warp, mais dans l’espace matériel, nos combinaisons étanches nous protègent suffisamment pour un court trajet.»
« Ok Pacha, termine de jouer avec la console, pendant que je dégage notre voie de sortie !!! » Concentré sur sa tâche Lagardère ne répond pas. Le Tellier observe une dernière fois la silhouette devant lui. Son « pacha » est épuisé. Il va falloir qu’il le surveille avec attention. Les sorties dans l’espace sont dangereuses.
« Bah, c’est à ça que servent les sous off. Protéger les officiers de leurs erreurs »
« Qu’est ce que tu dis ? »
« Rien ! Bosse ! » Répond Le Tellier qui est surpris d’avoir formulé sa pensée à voie haute... et de penser à son bleu bite d’ami comme à un officier. Repoussant ses réflexions à plus tard, il se met au travail et commence à dégager une voie vers l’extérieur.
Hagork, vient de prendre le contrôle de la deuxième passerelle. Cela n’a pas été sans mal. Une autre porte s’est bloquée devant lui. Il s’est calmé en assommant le premier mékano qui passait. Lui, le boss du vaisseau n’a pas à être bloqué par une foutue porte. Le simple fait que de nombreuses portes se bloquent depuis quelque temps n’est pas une excuse. La passerelle permet la projection sur un des écrans des senseurs extérieurs. Les autres vaisseaux orks se rapprochent à distance d’abordage. Hagork leur envoi un message. Ils n’ont pas besoin d’aide. Le boss veut surtout éviter qu’une autre bande essai de capturer son propre vaisseau lors d’un abordage surprise. Après avoir fait activer les armes du bord. Hagork se sent plus rassuré. Les autres vaisseaux orks finissent par partir. Ils sont dégoutés par tant de méfiance injustifiée. Hagork se concentre alors sur l’état de son vaisseau. Le mékano, qui a repris ses esprits, lui répond... prudemment de l’autre bout de la passerelle de secours. Hagork est agacé. De quoi a t’il peur ? Avant que le boss se lève, le mékano, branche un moniteur sur l’un des senseurs optiques de la passerelle. Hagork est fasciné. En plein milieu... trône un vaisseau léger. Les zoms ont attaqué avec l’un de leur engin, un engin de transport minable. Hagork est vexé. Qu’un croiseur endommage son vaisseau est une situation normale. Un chasseur surarmé, passe encore. Mais ce truc minable...
Un de ses boyz qui admirait sans retenue la vue se prend une baffe. Les autres boyz s’écartent prudemment ; le big boss est de mauvais poil. Hagork s’enfonce dans son siège. Cela va un peu mieux. Son regard est attiré, par une console allumée. Malgré les dégâts, il y a encore des trucs qui fonctionnent sur la passerelle ? Machinalement, il force son regard. L’affichage est bizarre. Il ne repère pas les glyphes qu’emploi les orks. Malheureusement, la définition de l’image est très inférieure à ses propres capacités. Il ne peut pas avoir plus de précision. Puis son regard est attiré par la navette. Un éclair jailli de celle ci et touche la passerelle. Puis un autre. L’écran se couvre alors de parasite.
« Keky s’passe ? » Demande t’il, le regard toujours rivé à l’écran. Avant que le mékano ne puisse répondre, le vaisseau se met à vibrer. L’écran et de nombreuses consoles s’éteignent. Le bruit transmit par les cloisons couvre toute conversation. Puis le silence se fait.
Les deux hommes cheminent difficilement sur la coque de la canonnière ork. A l’extérieure, la gravité artificielle est presque inexistante. Le risque de se retrouver éjecté dans l’espace profond est important. Plus expérimenté, Le Tellier prend les devants.
« Où est le panneau le plus proche ? » Demande t’il grâce aux petits émetteurs radios intégrés dans le casque de la tenue étanche.
« ... » Lagardère regarde dans toutes les directions. Sans répondre. Il est tout simplement trop épuisé pour pouvoir se repérer. Le Tellier pousse un juron. Il regarde dans toutes les directions et avise la tourelle la plus proche. C’est comme une grosse boule entourée de 4 longs tubes. Une tourelle de défense à tir rapide.
« On va là ! Suis-moi ! » Lagardère ne répond pas. Son souffle essoufflé est la seule réponse qui parvient aux oreilles de Le Tellier par le biais des radios. La progression est hasardeuse. Par miracle ils parviennent à la tourelle lorsque la navette explose. L’explosion est spectaculaire. Un jet de flamme et de débris sont projeté dans l’espace. Mais avec cette atmosphère trop tenue, il n’y a pas de bruit ni d’onde de compression pouvant provoquer l’éjection des deux hommes dans l’espace. Par contre, la tourelle leur procure un abri inestimable. Les nombreux débris projetés sont autant de projectiles mortels. L’explosion provoque une poussée suffisamment importante pour que le vaisseau dévie de sa trajectoire. Sous l’effet des forces centrifuge de ce mouvement, Lagardère perd contact avec la coque. Heureusement, Le Tellier veillait. Il l’attrape d’un bras tout en continuant à s’accrocher au fut du canon. Ramenant son ami sur la tourelle. Il prend contact avec lui.
« Donne-moi le code. Je vais ouvrir le sas de la tourelle »
« 012345. Il n’y a un panneau technique sur les tourelles de défense automatiques ? » Répond Lagardère.
« Comment tu crois qu’on peut réparer ou changer les tubes lorsqu’il y a un problème ? Accroche-toi à un des tubes. Dis donc, tu ne t’es pas fatigué pour le code ! On voit que tu as fait un stage de formation chez les mécanos et pas chez nous !!!» Lagardère est épuisé, mais il reste suffisamment lucide pour déceler l’humour sous jacent dans la remarque de son ami.
« Désolé, mais le seul autre code qui m’est venu en tête est celui des toilettes officier »
« Elle est nulle comme blague, tu sais ? » Répond Le Tellier qui continue à s’agiter pour enlever le blindage cachant l’accès technique à la tourelle.
« Je suis désolé »
« Désolé ? Tu peux ! Tu as vu dans quel état est la navette maintenant ? Je me demande combien de jours de trou on va se payer lorsque l’on... Super !!! T’est quand même drôlement fort !!! Reste où tu es. Tu es trop crevé ! Pour être réellement utile à quelque chose» Lagardère ne répond pas, maintenant que l’excitation du danger s’éloigne, ses nerfs ne le soutiennent plus. Le Tellier saisi son ami et le guide vers le petit orifice dégagé derrière la tourelle. Ils accèdent à un sas technique. Entre les tubes de canon de rechange et les accès techniques aux systèmes de ravitaillement en munitions, on distingue des tenues spatiales, des réserves d’air de secours et même des rations. Le Tellier verrouille le sas. Il ôte son casque tout en continuant à parler.
« Là, on est en sécurité. Les sas de ce type sont situés derrière les mécanismes des tourelles. Il est peut probable que l’on croise un ork à cet endroit. D’ici on pourra de cet endroit accéder à des consoles techniques où tu pourras faire joujou. On pourra même accéder à des postes de sécurité et piller les réserves de secours du vaisseau si elles n’ont pas été découvertes par les orks. En attendant, on va se reposer et... » Le Tellier s’arrête. Lagardère est immobile, il n’a même pas enlevé son casque alors qu’il y a une atmosphère respirable. Inquiet, il se jette sur lui. Et commence à le déshabiller, cherchant une blessure.
« Ne me fait pas cela ! On en est pas arrivé là pour que tu me lâche maintenant espèce de... » Le Tellier tient son ami. Sidéré. Il ne s’était jamais rendu compte que Lagardère ronflait à ce point.