Le Bossu - Chapitre 9
Chap 9 - Un dessin
Une fois dans l’énorme sas du Prométhé, Lagardère et Le Tellier vérifient la présence d’une atmosphère. Elle est respirable et la température est correcte. Les deux hommes enlèvent leur scaphandre. Ils font un rapide inventaire du matériel présent dans ce sas. Il y a d’autres scaphandres, des réserves d’air, des propulseurs spatiaux et des tenues étanches de réserves. Bref, tout est en place dans un local de ce type. Ils enfilent alors chacun une des tenues étanche et y fixent une petite réserve d’air. Au cas ou...
Après s’être orienté à partir des plans d’évacuation affichés sur les parois, les deux hommes se dirigent vers la passerelle. Celle ci est propre, nettoyée serait plus précis. Même si la majorité des consoles sont remises en place, la majeure partie des systèmes de fixations ont été arrachés. Les sièges des postes sont remis en place, mais les soudures chimiques montre qu’il s’agit d’un matériel de rechange. Tout, ou presque, à été replacé ou remplacé après avoir été arraché. Qu’à t’il bien pus se passer à bord de ce vaisseau ?
« Ordinateur, Second maître admissible Lagardère, marine arcadienne, matricule 219..007. 0591. Je demande à avoir accès au livre de bord et à l’ensemble des systèmes du bord » Ils veulent savoir ce qu’il s’est passé à bord. De plus l’accès à l’ordinateur du bord est indispensable pour connaître l’état du vaisseau. Ce qui leur permettra de savoir s’il est seulement possible de renflouer ce vaisseau. Et surtout, les deux hommes se demandent s’ils sont bien les seuls à bord à bord du Prométhé.
« Veuillez préciser à l’Intelligence Artificielle qui gère le vaisseau votre affectation au sein de la marine arcadienne et les évènements qui vous ont amené à bord, s’il vous plait. » La voie sort des haut-parleurs de la passerelle. Le simple fait d’entendre cette voie est un excellent présage. Malgré tous ses dégâts, le Prométhé n’est pas qu’une simple épave qui dérive. La majorité de ses systèmes internes fonctionnent.
« Je te laisse expliquer cela, Pacha ! Ordinateur ! Pourrais je avoir pendant ce temps le rapport sur l’état du vaisseau sur une des consoles ? » Demande Le Tellier.
« Demande acceptée. État affiché sur la console navigation qui est devant vous. Veuillez préciser qui assure le commandement de votre groupe. »
« C’est lui ! » Répond Le Tellier en désignant son « Pacha » tout en s’asseyant devant la console devant lui.
« Tu es plus gradé que moi ! Tu devrais assumer cela ! » S’exclame Lagardère.
« Écoute, ici on est dans un trou paumé. La hiérarchie habituelle ; on la met de côté. Depuis les combats sur l’Aurore, c’est toi la tête. Moi, je suis les jambes ! Tu as toutes les qualités d’un foutu officier de marine. Pas moi ! Je ne t’appelle pas Pacha que pour me moquer de toi. Quoique...
Ordinateur, veuillez enregistrer que le commandement est assuré par le second maître admissible Lagardère. »
« C’est contraire au règlement » Essaye de temporiser un Lagardère encore surpris par la décision de son ami.
« Tu préfère que je t’en donne l’ordre ? » Demande en rigolant Le Tellier.
« Le commandement est enregistré au nom du second maître admissible Lagardère. Veuillez donner les noms et qualité de l’homme qui vous accompagne et ensuite veuillez accéder à notre première demande s’il vous plait » Demande la voie des haut-parleurs. Lagardère soupire. Puis, il commence à raconter leurs aventures.
Les deux hommes sont décidés. Une caractéristique plaisante. Leur demande d’accéder aux contrôles du vaisseau est légitime. Mais, il est hors de question qu’il leur laisse tous les droits sur les contrôles. Pas encore. Ce qu’ils ne sont pas obligés de savoir...
« Votre histoire, depuis l’arrivée du dernier vaisseau ork dans la périphérie de ce système planétaire, est confirmée par les données recueillies par nos propres senseurs et par ceux des vaisseaux extérieurs qui sont connectés à notre ordinateur depuis notre propre arrivée dans ce système. Les vaisseaux orks habituellement affectés à la protection du chantier spatial ork ont été endommagés mais non détruits. Le vaisseau ork dans lequel vous affirmés être arrivé s’est écrasé sur le chantier spatial ork. Les dommages sont énormes, mais une réparation provisoire semble probable. Nous enregistrons cette victoire à votre actif dans le livre de bord du Prométhé.
Accès accordé aux systèmes de contrôle du vaisseau. En l’absence d’ordre de l’amirauté reconnu par le système du bord, vous accédez au commandement du Prométhé. Les systèmes du bord vont être initialisés et sont affichés sur les consoles respectives. Voulez-vous un rapport sur l’état du vaisseau sur la console de commandement Pacha ? » Lagardère est officiellement commandant de ce vaisseau. Il semble statufié.
« Ouah !!! Pacha, tu es Pacha ! C’est méga cool !!! » Se moque Lagardère ! « Tu veux connaître l’état de ton premier commandement Pacha ? »
« Heu... Oui » Répond un Lagardère encore étourdit.
« Grosso modo, tout fonctionne, sauf la propulsion. Plus ou moins bien il est vrai. On a bien les contrôles latéraux pour se positionner, mais pas de vrais propulseurs sub-luminiques. Par contre, si on réussit à accéder à un vortex, on a tout ce qu’il faut pour y naviguer. L’armement est seulement défensif. Et encore, il est réduit au strict minimum, tout comme les écrans. La bonne nouvelle, c’est qu’on a des générateurs énormes !!! C’est un navire expérimental, pas un engin de combat.
Nous concernant directement ; il y a suffisamment de réserves d’air, d’eau et de nourriture pour nous pour plusieurs mois, voire presque une année. Maintenant je serais curieux de savoir ce qu’est exactement ce sabot. Je me demande comment il est arrivé ici et surtout où est l’équipage. »
« Ordinateur, je voudrais un résumé de la mission du Prométhé. Je veux l’historique de ce qui lui est arrivé à lui et à son équipage. Pourrions nous avoir une version résumée ? » Demande Lagardère sur les conseils de son ami.
« Le Prométhé est un vaisseau expérimental. Il a été conçu pour valider le concept de propulsion intra système par projecteurs de gravité artificielle et non par des propulseurs utilisant un principe de réaction... » Commence l’ordinateur.
Les systèmes de propulseurs classiques sont très fiables, mais ils sont également encombrant avec leur réserve de propergol. Les ingénieurs arcadiens ont voulu tester s’il était possible d’utiliser la gravité artificielle pour propulser un vaisseau. L’idée de base était de créer une anomalie spatiale artificielle avec une très forte gravité devant le vaisseau à propulser. Le vaisseau n’aurait alors plus besoin de propulseur, puisqu’il serait attiré par l’anomalie. Sur le papier, c’est parfait. Il y bien besoin de générateurs d’énergie énormes, mais un vaisseau n’aurait plus de propulseurs et tout ce qui va autour. On y gagne en masse, en volume mais aussi en accélération. Toutefois, la création de gravité artificielle n’est maîtrisée qu’à l’intérieur d’un générateur spécifique. Celui fait habituellement office de coque de vaisseau. A l’extérieur, la théorie est incomplète. D’où ce vaisseau expérimental.
Lors des premiers vols orbitaux, les premiers essais se révèlent encourageant. Il y a bien des problèmes de vibrations imprévus qui apparaissent. Mais, les ingénieurs sont confiants en la solidité des concepts et du vaisseaux. Enthousiasmés par les premiers résultat, un vrai vol spatial est préparé.
Lors de ce vol, les ennuis s’accumulent dès le que le Prométhé quitte l’orbite d’Arcadie. Les vibrations augmentent en intensité et gênent considérablement l’équipage. Plus l’on acquiert de la vitesse, plus les vibrations augmentent. Le commandant décide d’arrêter la propulsion gravitationnelle pour engager la propulsion de secours, plus classique. Mais il est déjà trop tard. L’anomalie gravitationnelle artificielle est entrée en résonance avec les champs gravitationnels du système planétaire. Elle est hors de contrôle et génère des ondes gravitiques de plus en plus importantes. Ces dernières provoquent des dégâts de plus en plus importants aux générateurs de gravités externes du Prométhé. Pire, des anomalies gravitationnelles se génèrent à l’intérieur de la coque, provoquant des dégâts importants et décimant l’équipage. Malgré l’arrêt total des générateurs gravitationnels du vaisseau, l’anomalie continue à se développer et soudain génère l’entrée d’un vortex spatial. Le commandant fait sauter les sécurités des propulseurs classiques pour essayer d’échapper à l’attraction du vortex. Malgré la poussée de ceux ci, le Prométhé ne peut y échapper. Il est aspiré dans le vortex et propulsé à travers le temps et l’espace.
Lorsque le Prométhé émerge dans l’espace réel, ses propulseurs sont irrémédiablement endommagés. Plus des deux tiers de l’équipage sont morts. Les survivants sont tous blessés. Le vaisseau se met alors à dériver. Une dérive qui va durer près de cents ans. Le Prométhé est pris dans un des mythiques courants spatiaux et finit par s’échouer à cet endroit. Les survivants vont s’occuper de leurs morts. Puis, ils vont essayer de réparer le vaisseau. En vain. »
« Que sont devenus les survivants ? » Demande Le Tellier fasciné par l’histoire.
« Sachant que leurs réserves étaient limités dans le temps, les survivant ont tenté de trouver un moyen de survivre durant la période de la dérive. Ils ont fabriqué des caissons d’hibernation et s’y sont installés. Ils y sont stockés sous ma surveillance. » Reprend l’ordinateur.
« Peut on les réanimer ? » Demande Le Tellier ?
« Les caissons et les procédures suivies sont largement improvisés, en l’absence de personnel et moyens spécialisés, leurs chances de survie seraient dramatiquement faible » Répond la voie.
« Oui, mais... »
« Stop ! » Lagardère coupe net Le Tellier. « Nous n’entreprendrons rien qui ne puissent compromettre inutilement la survie de l’équipage. L’Intelligence Artificielle en garde le contrôle strict ainsi que des ressources nécessaires à leur fonction. Nous devons être avertis si un ordre entre en conflit avec cette priorité. Tu comprends ordinateur ? » En disant cela Lagardère regarde fixement son ami. Celui ci commence alors à comprendre l’intervention de son ami. L’intelligence artificielle doit être principalement programmée pour sauver l’équipage. Si elle se met sous les ordres des deux hommes, c’est autant pour suivre un protocole initialement programmé lors de sa construction que pour que les deux hommes l’aide à accomplir sa nouvelle mission principale ; sauver l’équipage en hibernation. En clarifiant ainsi la situation, Lagardère évite tout conflit d’intérêt à venir entre les deux hommes et le vaisseau.
La remarque du « Pacha » est extrêmement pertinente. Elle clarifie largement les situations respectives. Malgré sa constitution artificielle, c’est pour l’intelligence artificielle du bord un vrai soulagement. Pour la première fois, l’Intelligence se prend à supputer sur les notions si humaine de « chance » et de « malchance ». La poisse du Prométhé serait-elle un souvenir ? Calculant le comportement probable des deux hommes, le vaisseau décide alors de leur faire confiance et de leur accorder davantage de droits. Du moins dans la limite de l’accord qui vient de se conclure.
« Pourrions nous les voir ? » Demande alors Le Tellier. La demande semble autant surprendre Lagardère que l’intelligence artificielle. Durant quelques secondes, un temps incroyablement long pour ce type de machine, il n’y a pas de réponse.
« Suivez ce robot de maintenance ». Une sorte de cube monté sur trois roues apparait. Après s’être placé devant les deux hommes, il sort de la passerelle. Les deux hommes le suivent.
Placé à côté de la passerelle de secours, une porte blindée s’ouvre devant les deux hommes. A l’intérieur, des caissons cylindriques en matière synthétique sont alignés en quatre rangées.
« Vingt et un, vingt deux, vingt trois caissons » Énumère Le Tellier. Pendant ce temps, Largardère avance vers une console tactique qui se trouve au fond de la pièce, entre les derniers caissons centraux. De nombreux câbles la relient aux caissons. Contournant les connexions et les systèmes de contrôle et d’affichage, Lagardère s’arrête.
« Qui est ce ? » Demande t’il à l’ordinateur en fixant le cadavre momifié d’un homme placé devant les commandes.
« C’est l’officier responsable des systèmes de calcul du bord. Il est resté aux commandes des caissons pour superviser le processus d’hibernation pour le reste de l’équipage. » Répond la voie.
« Il est mort pour les autres. Faut un sacré courage pour faire un truc pareil ! » Affirme Le Tellier en s’approchant.
« Tu as vu ces câbles qui courent depuis son crane vers les systèmes de calcul. Pourquoi as t’il fait cela ? » Demande Lagardère. L’intelligence artificielle ne répond pas.
« As t’il tenté de transféré sa mémoire vers dans les systèmes du vaisseau » Demande encore Lagardère. C’est Le Tellier qui répond à sa place.
« C’est impossible Pacha ! Nous n’avons pas la technologie suffisante pour tenter cela. Nous sommes encore loin des standards Impériaux et je ne parle même pas de ceux de l’Adeptus Méchanicus »
La voie ne répond pas. Au bout d’un certain temps, Lagardère se concentre alors sur le clavier. Il le pousse et dégage une feuille jaunie par le temps. Elle est tellement ancienne qu’elle est presque friable. Malgré cela, on peut encore y observer un dessin d’enfant. On y reconnait la silhouette du Prométhé. Mais la configuration est très différente. Le Tellier s’approche du dessin. Il l’examine et s’exclame ;
« Cela devait être le dessin de son fils. Tu as vu, il a eu la même idée que toi. A la place du propulseur de poupe, il a mis une pièce d’artillerie. Et les générateurs de gravités sont remplacés par des propulseurs classiques. C’est rigolo. Avec cette configuration, la coque du vaisseau donne l’impression d’être tordue. On dirait que le vaisseau est comme... « bossu ». Dommage que l’on ne puisse pas faire pareil... »
« Pourquoi ? » Demande Lagardère songeur.
« Pourquoi quoi ? » Répond Le Tellier surpris.
« Pourquoi ne peut on pas faire pareil ? » Insiste Lagardère.
« Mais... D’abord... Heu... » Le Tellier hésite. Une telle transformation est impossible. C’est un travail que refuserait le moindre chantier spatial. Son ami ne veut quand même pas faire à deux de tels travaux.
« Le vaisseau est sain. Les propulseurs ne manquent pas dans les épaves à côté. Et puis on a déjà repéré les grosses pièces mécaniques indispensables à la fixation des propulseurs dans le cargo où on s’est reposé. On pourra même installer sur la coque ton canon. » Affirme Lagardère tout en continuant à examiner le dessin. Refusant de mordre à l’hameçon, Le Tellier tente une dernière fois de raisonner son ami
« Rien que pour rassembler les pièces ce sera un travail de titan... »
« On a quelque chose d’autre à faire ? » Répond Lagardère en fixant son ami.
« Pacha, tu oublie les orks qui trainent à côté... »
« Raison de plus pour nous dépêcher. Il faut que l’on soit prêt avant eux ! Ordinateur, il me faut les caractéristiques et spécificité de ce vaisseau. As ton le manifeste de bord avec toutes les pièces embarquées ?... » Le Tellier soupire. Lagardère a pris sa décision. Le Tellier connait suffisamment son ami pour savoir que c’est inutile d’essayer quelque chose pour qu’il change d’avis. Se remémorant la discussion, Le Tellier s’exclame.
« Et comment tu va faire pour fixer mon canon à la coque ? »...