Des robots américains à la place des fermiers français ?
Si vous suivez ce blog depuis quelques temps, vous avez pu constater que le lien entre robotique et agriculture est de plus en plus fort. Certes, on est loin de l’importance de la robotique dans l’industrie, mais le nombre de robot agricole ne cesse de progresser. Cette progression ne va pas de soit. Les agriculteurs sont réticents. Les collectifs d’agriculteurs se méfient du plan de relance de février 2022 qui porte sur le numérique, la robotique et la génétique. Il faut bien avouer que le plan de ralance se place dans une logique de maximisation des rendements qui les obligerait à investir massivement… à leur risque et périls.
Les précédentes mutations agricoles (mécanisation à partir des années 1950 et chimie à partir des années 1960 ) ont nécessité de forts investissements qui ont fini par appauvrir de nombreuses exploitations en France. Or les pouvoirs publics de notre pays ne cessent d’annoncer les investissements pour moderniser l’agriculture française. Et effectivement, il y a bien eu un réel travail de l’état pour moderniser la production agricole française. Mais les agriculteurs ayant pu bénéficier de ces aides sont bien rares.
L’état a bien investi auprès de nombreuses « start up » françaises … qui ont été majoritairement racheté par le géant américain John Deere ou qui ont fini par déposer leur bilan. Pour de nombreux observateurs l’argent public investi dans la modernisation de l’agriculture a été gâché en vain.
Il faut noter que la loi américaine « Digital Millennium Copyright Act » oblige chaque utilisateur à passer par John Deere pour toute réparation. Ce qui implique une totale dépendance vis à vis du groupe américain alors que les produits ont été financés par les impôts français… Il est ironique de constater que John Deere impose de passer par ses ateliers (la réparation rapporte plus que la vente), mais que dans le même temps, les logiciels utilisés par John Deere et CNH Industrial de New Holland.sont connus pour être particulièrement vulnérables à des attaques informatiques.
L’autre souci du matériel américain consiste en la collecte des données. Les robots sont dotés de nombreux capteurs qui collectent en continu de très nombreuses données. Or en 2011, John Deere à transmis à d’autres entreprises les données collectées par les utilisateurs de ses tracteurs. Le marché pour John Deere est d’autant plus juteux que les tracteurs John Deere sont les engins les plus utilisés.
Ce constat est d’autant plus rageant que les entreprises françaises ont été en pointe dans la robotique agricole. La majorité des innovations sont initialement issues du travail d’ingénieurs de notre pays. La concentration des brevets aux mains d’entreprises US, qui bénéficient du soutien inconditionnel de l’administration et de la justice américaine implique une réelle perte d’autonomie pour notre production agricole.
Toutefois, les agriculteurs français ont su s’organiser via des partages de connaissances, des échanges de pratiques et même de production artisanale de matériel, voire de semences via des réseaux collaboratifs. Il faut noter que telles pratiques sont souvent jugées contraires au droit européen ! De tels échanges produisent souvent à la production de matériel particulièrement adapté, voire innovant, mais sans recourir à l’utilisation d’outils informatiques ou robotiques. Ces nouveaux outils pourraient faire l’objet d’une production en petite série, voire d’adaptation à des productions plus importantes. Mais pour que ces derniers soient produits dans notre pays. Il va falloir que l’état s’investisse dans la protection des brevets qui pourraient en découler et qu’il les protège. Un constat qui est malheureusement habituel depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Car c’est un travail énorme auquel notre administration est actuellement incapable de faire face.