Le « Eiffel » russe de l’ère Steam Punk Vladimir Choukhov
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Eiffel est une icône française à juste titre. Outre l’ingénieur capable de lancer des ponts ou des structures de fer qui durent encore de nos jours, il a également été un homme d’affaire avisé et un scientifique de premier plan en particulier en étant un des créateur de l’aérodynamisme en tant que science. Mais les russes ont avec Choukov un homme d’une envergure comparable. Tout comme Paris à une structure métallique connue et admirée dans le monde entier : la tour Eiffel, Chouhkov à conçu une construction en acier de 50 étages à Moscou : la tour Hyperbolique. Et cela n’a pas été son seul tour de force…
La tour Chouhkov est peu connue du grand public, mais elle est une référence pour les ingénieurs structures. L’exposition de l’art de l’ingénieur du Centre Pompidou y fait référence tout comme l’exposition des meilleurs désign et bâtiments de l’architecture de Munich en 2003. Le principe de construction est breveté en 1884 et en 1886.
Ces tours sont des treillis de poutres métalliques légères. Si les poutres sont droites, leur placement est étudié pour obtenir une structure en forme d’hyperboloïde. Pour comprendre, il suffit de penser à un pannier en osier : une structure complexe, mais simple à réaliser et capable supporter un poids conséquent. Les tours de Choukhov utilise le propre poids de la structure et de ce que l’on y rajoute pour mieux résister aux efforts et aux vents.
Mis en œuvre en 1896 à Polibino pour l’exposition Panrusse, la première tour Choukhov existe toujours. Plus de 200 autres seront construites. La plus célèbre est la tour Choukhov à Moscou, construite de 1919 à 1922. Il faut noter que Choukhov a remporté ses concours grâce au coût de ses constructions. Piotr Khoudiakov a écrit : « les inventions de Choukhov étaient détestées par de nombreux fonctionnaires parce qu'elles étaient « affreusement bon marché » et ne laissaient pas de possibilités de détournement de fonds. »…
Tout comme Eiffel qui va créer de nombreuses structures différentes en fer, Choukhov adapte ses structures en grille à d’autres usages : ainsi les toits en treillis du musée des beaux-arts Pouchkine, le bureau des Postes et surtout la gare de Kiev (230m!) ont été conçus par Choukhov et existent toujours. Il faut noter que le brevet des structures Choukhov va être acheté par la marine US pour créer des mats en treillis sur ses navires de ligne au début du XXe siècle. Toutefois, cette adaptation sera abandonnée après la première guerre mondiale au profit de mats tripodes plus simple et tout aussi solides.
Mais ce n’est pas le seul brevet Choukhov acheté par les USA…
En 1876, Vladimir Choukhov invente une buse à vapeur pour disperser le mazout. Plus que les structures en acier, le pétrole et les moteurs vont être le principal travail de Choukhov. En 1891, il travaille sur une installation tubulaire destiné à la transformation du pétrole en huile, gazole et produits pétrolier. Cette méthode est connue sous le nom de « craquage thermique »… et est une invention russe et non US. Les ingénieurs William Burton et Robert E. Humphreys ont bien inventé une méthode similaire … en 1908 seulement. Aussi lorsque la compagnie Rockefeller’s Standard Oil réclame les droits exclusifs de l’invention du craquage du pétrole… elle doit racheté en toute urgence les brevets Choukhov à l’URSS !
Continuant travailler dans les pétroles, il va créer le premier oléoduc russe en 1878 à Bakou. Un autre va relier Bakou à Batoum en 1907 et atteindre la longueur record de 883 km. D’autres, plus modeste suivront.
Si les brevets Choukhov sont vendus aux USA, ce pays inspire également l’ingénieur. Lors de sa visite de l’exposition universelle de Philadelphie, il examine et analyse le reseau de transport ferroviaire américain. Puis fort de cette connaissance, il va travailler à créer un réseau ferroviaire russe. Grâce à lui plus de 400 ponts permettent de créer un réseau fonctionnel en Russie. Mais ce n’est pas ce dont il est le plus fier.
Choukhov est un photographe acharné. Reportages, paysages urbains, portrait … plus de 2 000 clichés sont parvenus jusqu’à nous et constituent une source d’information sur la Russie qui est utilisée par les historiens.
Choukhov va traverser la première guerre mondiale et la guerre civile russe en Russie. Pourtant, nombreux sont ceux à lui offrir des postes attractifs à l’étranger. Il va préférer rester dans sa Russie. Il réalise de nombreux édifice et ne va pas être inquiété par les communistes. Au contraire, en 1928 il devient Héros du Travail et membre honoraire de l’académie des sciences d’URSS. Lors de la terreur stalinienne, il prend sa retraite et ne sera pas inquiété. Il meurt en 1939 à 85 ans.