Où faire fortune pour un Afro-Américain en pleine ère Steam Punk ? En Russie Tsariste.

Au XIXe siècle, qu’il soit un esclave ou même un homme (ou une femme) libre, il ne fait pas bon être noir aux USA. Le racisme est réel et fait que de nombreux Afro-Américain vont tout faire pour changer de pays. Certains vont aller au Canada. D’autres, comme, plus tard, Eugène Bullard ou Joséphine Baker vont tenter leur chance en France. Mais l’un d’eux, Frederick Thomas va choisir d’aller dans la Russie des Tsars. Un choix gagnant. Il fera fortune dans les boites de nuits. Il faudra une guerre et une révolution pour le ruiner.

Frederick Thomas nait dans le Mississippi en 1872. Il est le fils d’esclaves affranchis et va tout faire pour changer de vie. Après avoir voyagé vers le nord des USA… où il ne sera pas mieux traité que dans le sud, il part pour l’Europe. Intelligent, il apprend le français et devient maître d’hôtel et valet de chambre au service d’un russe à Monte-Carlo. Il découvre également les divertissements « à la française » (Revue de danse, Cabaret, Jeux…) et observe l’engouement que cela suscite auprès de la clientèle fortunée. Si à Monte-Carlo et à Paris, toutes les places sont prises… en Russie, il n’en est rien.

En 1903, il travaille comme maître d’hôtel au Cabaret Aquarium à Moscou. Les « noirs » sont inconnus en Russie à l’époque. Aussi son apparence exotique, renforcé par son charisme va lui ouvrir toutes les portes. Il épouse Hedwig Hahn dont il aura trois enfants. En 1908, il devient maître d’hotel du Iar à St Petesbourg. Ce club est fréquenté par le célèbre Raspoutine, dont l’influence sur la famille impériale est connue.

En 1910, sa femme meure d’une pneumonie. Après son deuil, il devient un des propriétaires de l’Aquarium à Moscou et en prend la gestion après des travaux de remise en état. Le succès et la fortune de Thomas sont là. Riche, il investit dans un autre club : le Maxim. Ce dernier club fait polémique : il est situé à côté d’une église orthodoxe alors que les spectacles proposés sont à la limite de la convenance de l’époque. Mais les relations de Thomas lui permette d’avoir toutes les autorisations. Riche et célèbre, il se marie en 1913 et lance la première société théâtrale par action russe pour ouvrir de nouvelles salles dans les principales villes de l’Empire.

La première guerre mondiale freine ses activités, mais il réussit l’exploit de maintenir des exploitations bénéficiaires et investit dans l’immobilier et demande la nationalité russe.

Si Thomas à réussis à surmonter la première guerre mondiale, l’arrivée des bolcheviks en 1917 est pour lui une catastrophe. Ses propriétés sont nationalisées … et il surprend sa femme avec un commissaire bolchevique. Pire, sa femme demande à son amant de le tuer !

Considéré alors comme un « ennemi de classe », Thomas fait alors l’objet d’une surveillance par la police secrète. Il est obligé de fuir avec ses enfants et se réfugie à Constantinople (Istanbul maintenant). Il ouvre un autre « Maxim », importe la cuisine et les décors russes et le Jazz. C’est encore un succès grâce à la communauté russe qui a fuit la révolution. Mais les émigrés russes, qui constitue le cœur de sa clientèle, se retrouvent vite sans ressources et le Maxim va finir par péricliter. Thomas est jeté en prison pour dette et meurt ruiné en 1928.

Frederick Thomas va trouver hors des USA du XIXe siècle, le moyen de faire de faire fortune. Intelligent, motivé, charismatique il va trouver en Russie un terrain de jeu à sa mesure. Mais il va surtout trouver une société qui n’est pas raciste. C’est pourquoi il va s’y attacher.